Une politique commerciale fin-de-siècle :
les États-Unis et les grands équilibres démocrates
sous l'administration Clinton
Bruno Hamel
Continentalisation, Cahier de recherche 97-1, Avril 1997
Amérique, tu as plus de chance
que notre vieux continent.
Tu n'as pas de châteaux en ruine.
Goethe
Introduction
En 1991, nous entreprenions une étude exhaustive des
mécanismes et des orientations de la politique commerciale des
États-Unis.[1] Après la signature
de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), la
ratification des accords de la ronde de négociations de l'Uruguay,
créant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), l'abandon des
négociations de libre-échange avec le Chili et la proposition
d'abolir le Département du commerce ; un retour sur la politique
commerciale américaine nous a semblé tout aussi nécessaire
que pertinent.
Contrairement à la décennie précédente, la position
économique et commerciale des États-Unis dans le monde s'est
relativement raffermie : autant les déficits public que commercial
apparaissent maintenant maîtrisés. En 1995, le déficit
commercial américain atteignait 159$ milliards, dont 59 et 40$ milliards
avec le Japon et la Chine.[2] Ces deux pays
sont donc demeurés les cibles prioritaires dans l'ouverture des
marchés préconisée par Washington.
Bien que le déclin relatif des États-Unis ne se dément
guère, une certaine prospérité économique a permis
d'alléger les pressions protectionnistes aux États-Unis et ce,
même si 1995 marque une certaine dégradation du commerce
international des États-Unis alors qu'ils connaissaient leur pire
performance depuis 1987-1988.[3] Cela n'a pas
été sans importance sur la conduite de la politique commerciale
américaine durant le premier mandat de Bill Clinton.
En effet, bien qu'il s'agisse de succès commerciaux mitigés, ces
données internationales ont néanmoins permis une prise en compte
plus importante des déterminants politiques nationaux dans
l'élaboration de la politique commerciale. En guise d'introduction,
nous rappellerons l'importance prise par des questions d'ordre autre
qu'économique comme la protection de l'environnement et des droits
sociaux, voire de la démocratie, comme nouveaux paramètres
de la politique commerciale américaine. Ces nouveaux paramètres,
qui émergeaient déjà durant les dernières
années de l'administration Bush, ne renvoient pas tant à des
considérations idéologiques qu'à des motivations
partisanes.[4] En effet, il s'agit là de
questions qui restent au coeur des préoccupations de franges importantes
du parti démocrate aux États-Unis. Ces franges politiques
progressistes du parti démocrate sont apparues d'autant plus influentes
qu'elles servaient de contrepoids à un Congrès plus hostile que
jamais aux initiatives de la Maison-Blanche.
D'autres déterminants nationaux, comme la lutte au déficit et au
crime, se sont même révélés cruciaux dans la
reformulation des mécanismes de la politique commerciale des
États-Unis. Bref, nous nous proposons de montrer que la politique
commerciale américaine du régime Clinton s'est
caractérisée par une emphase marquée sur les
déterminants nationaux plutôt que sur les données des
rapports internationaux.[5]
Cette orientation récente, qui n'est pas sans rappeler la tendance
naturellement isolationniste des États-Unis, a été
assortie d'un retour à des arbitrages plus nuancés et plus
pragmatiques entre les pressions protectionniste et libre-échangiste qui
s'exercent sur les autorités réglementaires et commerciales
à Washington. Il s'agit là d'une rupture remarquable avec un
libre-échangisme presque dogmatique qui a été l'apanage
des administrations Reagan et Bush. Lorsqu'on sait à quel point le
pouvoir des autorités commerciales américaines est lié
à la nature de ces arbitrages, on comprendra dès lors les
reformulations dont la politique commerciale américaine fut l'objet
depuis 1992. Il n'en demeure pas moins que ces arbitrages sont demeurés
subordonnés à des considérations d'ordre politique et
national. C'est donc dans cette perspective de déclin relatif ou de
triomphalisme << par défaut >> que les États-Unis
sous Clinton ont cherché à remettre la politique commerciale au
centre des questions nationales.[6]
Aucune politique extérieure ne saurait être
entièrement indépendante des intérêts nationaux qui
l'animent.[7] Cependant, l'administration Bush,
entre autres, aura montré à quel point les objectifs poursuivis
par le pouvoir exécutif aux États-Unis pouvaient se distinguer
des intérêts nationaux. L'épisode de la Guerre du Golfe,
qui propulsa le président Bush à des sommets de
popularité, s'avéra rapidement une victoire à la Pyrrhus
alors que ce triomphe de la stratégie visait, en fait, à occulter
un important marasme économique aux États-Unis mêmes.
C'est également cet écart politique, entre les succès de
la politique extérieure et les revers sur la scène nationale, qui
s'est creusé tout au long des années Reagan et qui a
exacerbé les pressions protectionnistes à Washington durant les
années 1980.[8]
En effet, alors que la présidence Bush s'est soldée par une
emphase particulière pour les questions d'ordre international,
dès 1992, Bill Clinton a clairement souligné son intention de
<< rapatrier >> les préoccupations de la Maison-Blanche. Ce
rapatriement ne tenait pas qu'à un opportunisme électoral mais
aussi à des nécessités politiques et institutionnelles.
Le Congrès dont a hérité Bill Clinton a été
durement mis à l'épreuve quant à son adhésion aux
avancées du libre-échange dans le monde. Après la
ratification de l'Accord canado-américain de libre-échange
(ALÉ) en 1988, celle de l'ALÉNA en 1992, la mise en oeuvre
intégrale de l'Accord de libre-échange avec Israël en 1995
et, finalement mais non les moindres, les conclusions de la ronde de
l'Uruguay-- ratifiée en décembre 1994 ;[9] il n'est guère étonnant de constater les
réticences du Congrès à poursuivre plus avant les
initiatives de libéralisation commerciale dans les Amériques.
Parce que ces différentes négociations de libéralisation
ont été amorcées dans un contexte où les
États-Unis éprouvaient de sérieux problèmes
d'équilibres commerciaux, c'est-à-dire durant la deuxième
moitié des années 1980, de telles initiatives ne pouvaient que
mettre à l'épreuve les mécanismes et les équilibres
fragiles de l'appareil libre-échangiste américain. À cet
égard, on ne peut être sans rappeler les multiples coupures et
rationalisations des instruments de compensation commerciale entreprises par
les administrations républicaines, notamment en ce qui a trait au
Trade Adjustment Assistance program (TAA).[10]
Dans le passé, les différentes présidences ont
cherché à réconcilier les intérêts nationaux
et leur rôle de porte-étendard du libre-échange en
empruntant la voie de la politique par les exportations (export politics). Une
telle politique visait essentiellement à rassembler, voire à
susciter, les pressions politiques en faveur de la promotion des exportations
plutôt que de laisser les forces protectionnistes s'exercer sans retenue
sur les autorités américaines. C'est cette question qui renvoie
plus spécifiquement aux arbitrages commerciaux que nous voulons
commenter dans un deuxième temps.
Mais tout d'abord, dans un premier temps, ce que nous voulons souligner, c'est
que la politique commerciale a été le lieu de convergence de
plusieurs questions et intérêts relevant particulièrement
du panorama politique américain. Ainsi, des questions comme
l'immigration illégale, la lutte à la drogue, le respect de
normes élémentaires en matière de travail et la protection
de l'environnement, ces deux dernières faisant l'objet des accords
parallèles de l'ALÉNA, ont trouvé dans la politique
commerciale un véhicule privilégié afin de forcer les
partenaires commerciaux américains à se conformer aux ambitions
de Washington.[11] En ce qui nous concerne,
notre propos se limitera aux questions de nature plus économique, en
l'occurrence, celles ayant trait à la lutte au déficit et
à la << compétitivité >> de l'économie
américaine.
À partir de 1990, de nouvelles réglementations qui, dans leur
formulation, ne semblaient guère de nature à influencer la
conduite de la politique commerciale se sont révélées
être une nouvelle façon de réconcilier ces
intérêts nationaux et internationaux souvent divergents. En
effet, la Loi rectificative des finances de 1990 établissait le
principe du << pay-as-you-go >> en vertu duquel toute diminution
des recettes gouvernementales devait être compensée soit par une
augmentation correspondante d'autres recettes, soit par une diminution
proportionnelle des dépenses.[12] Dans
les faits, un tel principe conduit à lier libéralisation
commerciale et réduction de l'État puisqu'il est entendu que
toute hausse des revenus, qu'il s'agisse d'impôts corporatifs ou des
particuliers, ferait vraisemblablement l'objet d'obstruction au Congrès.
Par exemple, uniquement en ce qui a trait aux accords du GATT/OMC, les revenus
douaniers baisseront de 12$ milliards entre 1994 et 1999. Aux
États-Unis, le démantèlement du système de
protection tarifaire permettra ainsi des économies de plus d'un milliard
de dollars et s'inscrit en droite ligne avec les principes budgétaires
institués en 1990.[13]
La question du financement des libéralisations commerciales, et comment
elles doivent être liées aux questions budgétaires, n'est
qu'une facette de la contrainte budgétaire aux États-Unis et un
des éléments des nouvelles coalitions bipartisanes à
Washington. Cette contrainte budgétaire apparaît désormais
comme le principal paramètre dans la formulations des politiques
économiques américaines.[14]
Cet héritage républicain est aussi une façon de souligner
la continuité remarquable dans laquelle s'inscrit l'administration
Clinton par rapport à celle de ses prédécesseurs.[15] Toutefois, cette apparente
continuité idéologique doit être mise en relation avec
l'élection, en 1994, d'un Congrès à majorité
républicaine ultra-conservatrice et qui a forcé depuis la
Maison-Blanche à se détourner des traditionnels biais et
équilibres politiques des démocrates.
Sur les questions de politique commerciale, l'arrivée, sous la
férule de Newt Gingrich, de la droite ultra-conservatrice au
Congrès a impliqué de nouveaux réalignements parmi les
représentants politiques à Washington. À plusieurs
égards, nous pouvons donc dire que des questions comme le GATT et
l'ALÉNA ont reposé sur des coalitions plus idéologiques
que partisanes.[16] Ce réalignement
politique en fonction de biais idéologiques, comme une adhésion
plus ou moins ferme au principe du libre-échange, peut être
expliqué de par la nature politiquement peu attrayante des questions
commerciales et, sans doute plus important encore, de par la nature même
des interventions politiques de la droite républicaine qui en appelle
à des fondements plus idéologiques que spécifiquement
politiques, comme l'état minimal et le conservatisme moral.
Si les partis démocrate et républicain, et la Maison-Blanche et
le Congrès, ont montré une convergence idéologique
remarquable sur la question de la contrainte budgétaire, il en va
autrement en ce qui a trait à l'interventionnisme économique de
l'État en matière de développement industriel et de
création d'emplois.
En effet, un des points d'achoppement les plus décisifs entre les deux
grands partis politiques s'est avéré être l'orientation
à donner à la politique industrielle des États-Unis. Les
nominations de Laurea d'Andrea Tyson et de Robert Reich aux postes de
présidente du conseil économique du Président (Council
of Economic Advisers) et de secrétaire au travail, ont
signalé le début d'un interventionnisme relativement plus
musclé aux États-Unis.[17]
Tout comme Reich, et s'inspirant largement des nouvelles politiques
industrielles prônées par des chercheurs comme Paul Krugman, Tyson
a plaidé en faveur d'un << interventionnisme prudent >>,
essentiellement, correcteur des interventions politiques des partenaires
économiques des États-Unis.[18]
Ces renforts intellectuels autour du nouveau président démocrate
ne sont sans doute pas étranger au fait que la
compétitivité ait été élevée au rang
d'enjeu politique national lors de la campagne présidentielle de 1992.[19] Dans ce contexte, on ne soulignera pas
assez la subordination du commerce, et de la politique commerciale, aux
impératifs de compétitivité et de création
d'emplois que s'est donné l'administration Clinton.[20] Certaines études récentes ont d'ailleurs
mis en relief l'importance des pertes ou gains éventuels d'emplois comme
un des principaux déterminants des votes au Congrès en ce qui
concernait l'ALÉNA.[21]
Articulant la priorité à la création d'emplois et à
une plus grande compétitivité des États-Unis,
l'interventionnisme prudent consiste donc à favoriser l'émergence
et le développement de secteurs ciblés de l'économie
américaine. Les postulats de ces théoriciens consistent à
soutenir que des secteurs économiques peuvent présenter des
externalités positives considérables. Or, ces secteurs, comme
pour les industries de haute technologie, se caractérisent souvent par
des barrières à l'entrée ou des coûts de
départ d'autant plus prohibitifs qu'ils sont entretenus par les
interventions économiques des gouvernements étrangers. Bref, les
conclusions montrent que l'interventionnisme, dans certains secteurs
particulièrement productifs, peut être non seulement
justifié mais aussi profitable à l'ensemble d'une économie
nationale.[22]
Ainsi, en 1993, un débat ouvert s'est amorcé autour d'un
projet de Loi sur la compétitivité nationale (National
Competitiveness Act). Le projet prévoyait des fonds de 1,5$ milliards
pour la période allant de 1993 à 1995. Le débat ouvert au
Congrès signifie que les débats et les amendements peuvent
être illimités. Cette ouverture a permis de mesurer à quel
point les idéologies républicaine et démocrate pouvaient
être opposées en matière de politique industrielle. Cette
loi visait à restructurer de complexes programmes de subventions et de
prêts destinés à quelques 350 000 petites et moyennes
entreprises. L'essentiel des amendements proposés par les
républicains, et tous refusés, tenait plutôt à des
incitatifs et des dégrèvements fiscaux. D'autres programmes de
développement de la recherche, notamment dans les secteurs de la haute
technologie, ont connu une croissance remarquable durant les années
Clinton. Ainsi les budgets alloués au programme de technologie
avancée (Advanced Technology Program), sous la tutelle du
département du Commerce, sont passés de 10 à 490$ millions
entre 1990 et 1996.[23]
Ce programme, qui allie recherche fondamentale et développement de
produits, est une excellente illustration de cet interventionnisme prudent qui
a caractérisé les premières années de
l'administration Clinton. Cet interventionnisme n'a pas été sans
influencer certaines positions des États-Unis dans le cadre, par
exemple, des négociations multilatérales. Ainsi, les
États-Unis ont convenu, dans les accords de Marrakech, à un
assouplissement des règles sur les subventions à la recherche et
le développement de la haute technologie.[24] Ce faisant, l'administration Clinton,
récupérant une stratégie élaborée par ses
prédécesseurs républicains, a eu recours aux organisations
multilatérales, nommément le GATT/OMC, afin de concrétiser
des initiatives économiques ou commerciales qu'elle ne pouvait
réaliser autrement à partir du théâtre national.
Dans le passé, ce recours au GATT visait surtout à renforcer les
différentes mesures de libéralisation mises de l'avant par les
administrations Reagan ou Bush. Sous Clinton, il s'agit plutôt
d'inscrire ou de normaliser une certaine orientation économique,
l'interventionnisme prudent, dans les cadres internationaux ou
multilatéraux. Comme on s'en doute, un tel détournement ne
pouvait être sans susciter des réactions politiques très
vives au Congrès où les républicains ont condamné
ce qu'ils ont qualifié de changement de cap radical dans la politique
commerciale américaine.[25]
Mais dans quelle mesure, cette nouvelle orientation idéologique, comme
une des grandes caractéristiques de la politique économique de
l'administration Clinton, s'est-elle traduite effectivement par un nouvel
interventionnisme ? La question prend tout son sens lorsqu'on sait à
quel point l'administration démocrate, surtout durant les derniers mois
du premier mandat de Bill Clinton, a puisé largement dans le registre
idéologique et politique des républicains, notamment en ce qui a
trait à des questions comme l'avortement, la lutte au crime et à
la drogue et la lutte au déficit. La question même de
l'assurance-maladie, un des éléments centraux du programme de
Clinton durant la campagne présidentielle de 1992, est disparue au
feuilleton du Congrès après une guérilla politique
menée par le Congrès. Cet échec législatif, et le
récent conservatisme affiché par l'administration Clinton lors de
la campagne de 1996, nous forcent à envisager le fait que
l'interventionnisme prudent pavoisé par les penseurs des politiques
industrielles stratégiques entourant le président Clinton n'ait
été au fond qu'un interventionnisme timide.
Découlant des nouveaux équilibres politiques et institutionnels
à Washington, ce bémol à mettre à
l'interventionnisme des premières années de Clinton confirme
cependant encore plus l'importance des déterminants nationaux sur la
politique commerciale des États-Unis. Ce sont autant ces
déterminants que ces équilibres qui nous permettent de mieux
comprendre le réaménagement du cadre institutionnel de la
politique commerciale américaine depuis 1992.
Depuis 1992, deux initiatives ont été de nature à
transformer de façon importante le cadre institutionnel de la politique
qui nous intéresse. Premièrement, la création du <<
Conseil de sécurité économique >>(CSE) (Economic
Security Council)[26] et deuxièmement,
la volonté, affichée sans succès par le Congrès
républicain, d'abolir le département du Commerce, c'est cette
dernière initiative que nous commenterons tout d'abord.
Au cours des débats sur le budget de 1996, plusieurs membres
républicains du Congrès, dont le représentant de la
Louisianne, Robert Livingstone, posaient simplement la question : << When
we put our trust in the great free-enterprise system of this country, one does
have to wonder why we need a Commerce Department. >>[27]
L'idée d'abolir un département du gouvernement des
États-Unis est un fait sans précédents. Le
département du Commerce, dont le budget annuel s'élève
à un peu plus de 4$ milliards, poursuit des activités disparates,
comme les activités de recensement, de recherche et de surveillance
océanique et du dépôt des brevets. Plusieurs de ces
activités peuvent facilement être réparties dans les autres
départements. Cependant, l'idée d'abolir le Département
du Commerce, outre une symbolique lourde de sens, a bien illustré
à quel point les considérations nationales tiennent le haut du
pavé dans la formulation des politiques économiques des
États-Unis.
En effet, même s'il est possible d'envisager l'abolition de ce
département, qui, selon le Congrès, aurait permis des
économies de 7,8$ milliards sur une période de cinq ans, comme
une des rançons budgétaires à la ratification des accords
de l'OMC ; elle marque surtout la force de l'opposition républicaine aux
ambitions politiques de l'administration démocrate. En effet, de
nombreuses initiatives de politique industrielle, surtout celles ayant trait
aux industries de haute technologie, sont menées par le
département du Commerce. En proposant l'abolition du
département, il s'agissait, pour plusieurs membres républicains
du Congrès, de contrecarrer le volontarisme de la Maison-Blanche en
matière de politique industrielle.[28]
Au premier chef, il s'agissait d'éliminer le programme de technologie
avancée géré par l'<< institut national des normes
et de la technologie >> (National Institute of Standards and Technology--
NIST) du département du Commerce, un irritant politique
particulièrement important aux yeux des républicains. Les
économies ainsi réalisées devaient être
destinées à financer un autre engagement significatif de Clinton
durant la campagne de 1992 : permettre l'embauche de 100 000 nouveaux policiers
afin de lutter contre le crime et la drogue aux États-Unis. Plus
largement, la volonté d'abolir le département fut liée
à une restructuration des interventions internationales des
États-Unis. Ainsi, alors que Clinton réclamait des
crédits d'environ 31$ milliards pour les départements
d'État, du Commerce et de la Justice en 1996, comparativement à
des crédits de 27$ milliards en 1995, la Chambre des
représentants n'autorisa que des déboursés de 27,2$
milliards. Les départements d'État et du Commerce voyaient ainsi
leur budget amputé de 200 et de 1 300$ millions par rapport à
1995 alors que le département de la Justice a vu son budget passé
de 12,2 à 14,1$ milliards. À lui seul, le NIST devait accuser
des coupures de l'ordre de 365$ millions.
Le vote final sur le démantèlement du département du
Commerce s'est déroulé le 29 avril 1996. Or, quelques semaines
avant la tenue du vote, le secrétaire au Commerce, Ron Brown, connu une
fin plus que tragique dans l'écrasement de son avion lors d'une mission
commerciale en Bosnie. Cet élément émotif devait
confirmer les multiples démarches déjà amorcées par
les grandes entreprises américaines réunies au sein de l'<<
Ad Hoc Industry Coalition >> et bénéficiant des supports
à l'exportation et des différents services de recherche
économique du département.[29]
En outre, dès le dépôt des projets de loi par la Chambre
des Représentants et le Sénat, le département avait
entrepris une vaste restructuration de ses activités et avait
diminué ses effectifs de 38 400 à 35 500 employés. La
conjoncture de ces éléments fit en sorte que le
département du Commerce fut maintenu dans ses activités.
Il est certes envisageable que l'abolition n'ait été, comme
l'affirmait le secrétaire Brown, qu'un autre épisode de la
<< chasse aux trophées >> à laquelle s'adonnait les
républicains depuis leur élection majoritaire. En d'autres
termes, il s'agissait peut-être, pour le Congrès, de montrer sa
capacité à réduire la taille de l'État quitte
à s'accommoder d'une simple répartition des tâches à
travers les autres agences du gouvernement. Il n'en demeure pas moins que le
projet d'abolir le département du Commerce a entraîné une
restructuration et une rationalisation importantes d'un des piliers des
politiques économiques de l'administration Clinton. Cela étant,
ces restructurations ont également témoigné d'une nouvelle
sensibilité de la Maison-Blanche aux questions nationales et à
l'importance d'une coalition politique bipartisane et durable. Si la menace
d'abolir le département du Commerce, parce qu'elle ne s'est pas
concrétisée, peut cependant représenter un argument a
contrario de l'importance d'une coalition bipartisane et des
déterminants nationaux dans la formulation de la politique commerciale
américaine, la création du Conseil de sécurité
économique démontre bien l'ambition de l'administration de
recentrer la politique commerciale à l'ordre du jour de la politique
nationale aux États-Unis.[30]
Dès la campagne présidentielle de 1992, Clinton s'est
engagé à créer le conseil de sécurité
économique comme un corollaire au Conseil de sécurité
nationale (National Security Council). L'objectif avoué de la
création d'un tel conseil était d'élever au plus haut rang
des priorités les questions de politique économique nationale et
internationale.[31] C'est ainsi que le CEN en
est venu à se constituer comme la << pièce-maîtresse
du cadre d'élaboration de la politique économique >> aux
États-Unis.[32] Le rôle du
conseil est de rassembler, pour des fins de coordination et de discussion, les
différents départements ayant affaire aux questions de politique
économique. Ainsi, au niveau des discussions et de la coordination des
politiques au sujet des questions commerciales, le CSE surplombe les
responsabilités du Représentant au commerce des États-Unis
(United States Trade Representative-- USTR). Par contre, en matière de
négociation commerciale, le conseil, en principe, devait céder le
pas au Représentant au commerce. Dans la réalité, la
fonction d'organisme-parapluie qu'assure le Conseil fait en sorte qu'il
détermine souvent les objectifs des négociations commerciales si
ce n'est leur déroulement même.[33] Par ailleurs, la présidence du conseil est
assurée par un assistant relevant directement du président.
Durant les premières années du Conseil, la présidence a
été assurée par Robert Rubin, un avocat et un ancien
dirigeant la banque d'investissement Goldman Sachs de Wall Street.
La création, par la Maison-Blanche, d'un organisme économique
consultatif n'a rien de bien nouveau. En 1981, le président avait
créé le Conseil des affaires économiques du cabinet du
président (Cabinet Council on Economic Affairs) sans y avoir recours
véritablement. De la même façon, le président Bush
a très largement ignoré les prescriptions de la Commission
économique nationale (National Economic Commission). À plusieurs
chapitres, le Conseil de sécurité économique vient donc se
substituer à des organismes qui sont souvent restés lettre morte.
Néanmoins, le conseil créé par Clinton est la formule qui
s'approche le plus des recommandations des analystes de la politique
commerciale à savoir qu'une telle coordination entre les politiques
économiques nationales et internationales doit relever d'un organisme
ayant un accès direct au président et dont les
préoccupations doivent porter à la fois sur la dynamique
nationale que sur ses répercussions à l'échelle
mondiale.[34]
L'expérience et les connaissances du président Clinton en
matière de politiques économiques sont loin d'être
étrangères aux succès remarquables de son administration
en la matière. Ainsi, les succès des négociations
commerciales, le << triple-jeu >> de l'administration Clinton au
sujet de l'ALÉNA, du GATT/OMC et de l'APEC, ont permis d'éclipser
quelque peu les interventions militaires malheureuses en Bosnie et en
Somalie.[35]
En somme, le cadre institutionnel de la politique commerciale a
été refondu en fonction de nouvelles sensibilités
politiques et électorales aux États-Unis. Tout en prenant acte
du nouveau paramètre institutionnel qu'a pu représenter
l'élection d'un Congrès majoritairement républicain,
l'administration a réussi à traduire en avantages politiques des
succès économiques internationaux.
Cependant, souligner certains enjeux politiques nationaux, comme la contrainte
budgétaire et les impératifs de compétitivité, et
comment ils influencent le cadre de la politique commerciale, ne suffisent pas
à évaluer les orientations éventuelles de cette politique.
Dans une perspective de continentalisation des économies nationales dans
les Amériques, nous chercherons donc à voir comment se conjugue
cette << nationalisation >> de la politique commerciale
américaine avec les stratégies régionalistes mises en
place par les États-Unis à partir du milieu des années 1980.
Une analyse antérieure nous avait permis de conclure à
certaines caractéristiques fondamentales de la politique commerciale des
États-Unis.[36] Nous reprenons ici
quelques unes de nos conclusion essentielles. Premièrement, les
détenteurs du pouvoir exécutif, depuis Franklin D. Roosevelt ont
toujours milité en faveur du libre-échange. Deuxièmement,
le Congrès, surtout la Chambre des Représentants, s'est toujours
montré sensible aux doléances protectionnistes
exprimées par les firmes américaines. Finalement, des pans
importants du cadre d'élaboration de la politique commerciale
américaine ont visé à diffuser les pressions
protectionnistes, voire à susciter l'adhésion des groupes et des
firmes exportatrices aux initiatives libre-échangistes entreprises par
la Maison-Blanche. C'est à l'aune de ces caractéristiques que
nous voulons évaluer les transformations de la politique commerciale
américaine sous l'administration Clinton.
Nous avons dit également que le dogmatisme des administrations
républicaines, de Reagan et de Bush, avait durement mis à
l'épreuve les fragiles équilibres libre-échangistes. Ces
administrations se sont en effet caractérisés par de nombreux
vetos concernant des mesures de rétorsion commerciale
réclamées par le Congrès.[37] En effet, aux yeux des derniers présidents
républicains, la cause du libre-échange demeurait mieux servie
par des avancées multilatérales, comme à l'OMC, que par
des mesures unilatérales ou des réponses protectionnistes
exprimées par les autorités américaines.
Bien entendu, du point de vue de la politique commerciale américaine,
les années 1980 passent souvent pour la décennie de l' <<
unilatéralisme agressif >>. Or, cet unilatéralisme, ou ce
néo-protectionnisme, relève plus de considérations
stratégiques dans la poursuite des avancées du
libre-échange que d'une véritable option de repli commercial.
Autrement dit, les menaces protectionnistes, manifestées notamment par
le Congrès, sont toujours de nature à rappeler aux partenaires
commerciaux des États-Unis que l'accès au marché
américain ne va pas de soi. Cette position n'est pas sans importance
lorsqu'on en vient à négocier l'ouverture des marchés
internationaux. C'est dans ce contexte que Carla Hills,
l'ex-Représentante au commerce, parlait du marché
américain comme un << levier >> (crow-bar...) devant
permettre l'ouverture des marchés des partenaires des États-Unis.
Or, il est clair que l'adhésion plus qu'enthousiaste des administrations
républicaines au principe du libre-échange, bilatéral ou
multilatéral, pour être politiquement soutenable vis-à-vis
du Congrès et des entreprises américaines heurtées par les
importations, devait être assortie d'une rhétorique
protectionniste d'autant plus musclée.
On aurait tort de sous-estimer l'importance de ce discours
néo-protectionniste. Après tout, c'est beaucoup à ces
menaces protectionnistes que l'on doit l'empressement du Canada, comme du
Mexique, à négocier des ententes de libéralisation
commerciale devant leur assurer un accès relativement sûr au
marché américain.
Ces différentes données font également partie de
l'héritage républicain avec lequel la nouvelle administration
démocrate a dû composer à partir de 1992. À partir
de celles-ci, nous pouvons maintenant mieux distinguer l'originalité des
orientations de la politique commerciale sous l'administration Clinton.
Dans l'ensemble, nous pouvons dire que, depuis 1922, cette politique
commerciale est plus pragmatique et marque un certain repli sur les
intérêts immédiats des États-Unis. Plus
précisément, la politique commerciale américaine sous
Clinton se caractérise par des équilibres plus traditionnels tout
aussi bien entre les options que sont le libre-échange et le
protectionnisme qu'entre la Maison-Blanche et le Congrès.
Deuxièmement, l'idéal libre-échangiste apparaît
avoir perdu beaucoup de son lustre auprès des autorités
commerciales américaines. Enfin, les orientations commerciales pointent
vers une certaine forme d'isolationnisme, comme une pause dans la poursuite des
libéralisations commerciales au niveau international.[38]
Dire que les équilibres commerciaux sous l'administration Clinton ont
quelque chose de traditionnels nous renvoie bien sûr aux
équilibres institutionnels et politiques qui ont
précédé l'administration Reagan (1980-1988). Ainsi, l'un
des équilibres essentiels, bien que fragile, de la politique commerciale
américaine est le protectionnisme que la Maison-Blanche doit savoir
affirmer avec fermeté face aux partenaires commerciaux des
États-Unis.[39] Ainsi, lors des deux
dernières années de l'administration Bush, en 1991 et 1992, 150
enquêtes de mesures antidumping ont menées par les
États-Unis. Durant cette période, seulement 36 droits
antidumping ont été appliqués. Par contre, durant les 10
premiers mois (de janvier à octobre 1993) de l'administration Clinton,
et malgré l'institution de seulement 23 enquêtes, 62 droits
antidumping ont été levés.[40]
En apparence contradictoire avec l'adhésion traditionnelle du
président aux principes du libre-échange, c'est pourtant cet
équilibre qui a fait en sorte que, depuis Smoot-Hawley, le gouvernement
américain, malgré une dégradation considérable de
la balance commerciale des États-Unis, a toujours été en
mesure de promouvoir le libre-échange dans le monde. Ainsi, en 1990, le
président Bush laissait les dispositions de l'article 301
s'épuiser d'elles-mêmes. Ce faisant, il abandonnait un des plus
importants instruments de rétorsion commerciale. Comme symbole par
excellence de cet unilatéralisme américain, l'article 301
devenait particulièrement encombrant à un moment où les
États-Unis entreprenaient à la fois la négociation de
l'ALÉNA et la conclusion de la ronde de l'Uruguay. Après la
signature de ces accords, en 1994, la Maison-Blanche se voyait
confrontée aux hostilités du Congrès en vue de leur
ratification, qui fut l'objet de débats particulièrement
laborieux. C'est bien dans ce contexte que, désignant tout d'abord le
Japon comme cible prioritaire, Clinton décréta en 1994 le
renouvellement des mesures de l'article Super 301. Ce geste ne signifiait pas
tant la confirmation d'un nouveau protectionnisme à la Maison-Blanche
qu'un retour à un libre-échange plus nuancé de la part du
pouvoir exécutif. Ainsi, tout en permettant la ratification par le
Congrès d'accords de libéralisation de très grande
ampleur, le président coupait court à d'éventuelles
critiques politiques qui l'auraient dépeint comme celui ayant
livré le marché américain en pâture aux
compétiteurs internationaux.
Ces signaux protectionnistes émis par le président ont donc
permis de diminuer la force des pressions protectionnistes qui s'exercent
depuis toujours au Congrès et de maintenir le biais
libre-échangiste des États-Unis. On mesure bien la
qualité des initiatives de la Maison-Blanche lorsqu'on pense que
l'administration Clinton a dû composer avec de puissants adversaires,
comme le sénateur Gephardt au sein même du parti démocrate,
avec un Congrès particulièrement isolationniste et, finalement,
une balance commerciale qui, si elle montre une certaine amélioration
depuis quelques années, n'est guère reluisante.[41]
C'est aussi dans cette perspective de libre-échange nuancé que le
président Clinton n'a guère chercher à maintenir la
procédure accélérée (fast-track procedure) en vue
de permettre l'entrée du Chili dans le giron de l'ALÉNA. On se
convaincra rapidement des concessions auxquelles devra consentir le Chili, par
exemple, alors qu'il est maintenant dans l'attente du renouvellement par le
Congrès des procédures accélérées depuis
1994. Un renouvellement qui, du moins à court terme, semble bien
aléatoire.[42]
Un tel équilibre entre le protectionnisme et le libre-échange n'a
pas que des avantages politiques sur la scène américaine. En
effet, l'adhésion nuancée au libre-échange
manifestée par l'administration Clinton est de nature à confirmer
les partenaires commerciaux désireux de libéraliser leur commerce
avec les États-Unis dans leur rôle de << demandeur >>.
On sait déjà, que le président, à moins d'une
autorisation préalable du Congrès, n'est pas en mesure
d'instituer des négociations internationales mais qu'il peut y
répondre et, ensuite y participer. Bien entendu, les résultats
des négociations internationales doivent finalement être
ratifiées par le Congrès, d'où l'importance de la
procédure accélérée qui interdit au Congrès
tout amendement sur les résultats des négociations bien que les
membres peuvent refuser intégralement l'accord proposé.
Cependant, on devinera qu'il est malgré tout plus aisé d'inviter
les États-Unis à une négociation de libre-échange
lorsque la présidence est assurée par un fervent avocat de ces
principes, comme pouvait l'être Ronald Reagan. Bref, le retour des
équilibres traditionnels de la politique commerciale américaine
se soldera vraisemblablement par une participation plus restreinte, et plus
difficile, des partenaires commerciaux à des ententes commerciales comme
l'ALÉNA. Cela ne signifie pas que de nouveaux accords de
libéralisation, par exemple, avec des pays latino-américains ne
soient pas envisageables. Par contre, ce libre-échangisme plus
nuancé devrait commander des concessions plus importantes de la part des
pays-demandeurs.
Peut-être plus fondamental encore, ce refus d'un libre-échangisme
dogmatique, qui a si profondément marqué la politique commerciale
des administrations républicaines, implique d'abord un parti-pris
franchement pragmatique de la part de l'administration Clinton.[43] Ainsi, dans son énoncé de politique
économique, en 1993, le président ne cacha pas le pragmatisme
qu'il entendait faire sien en ce qui a trait à la politique commerciale
: (...) << notre politique commerciale évitera les vains
débats sur la question de savoir si les efforts devraient être
multilatéraux, régionaux, bilatéraux ou
unilatéraux. Le fait est que chacun de ces efforts a sa place.
>>[44] Dire ce pragmatisme revient
aussi à dire la difficulté de trouver une cohérence unique
aux différentes initiatives commerciales des États-Unis. C'est
aussi ce pragmatisme politique et électoral qui se trame derrière
la nomination du nouveau secrétaire au Commerce, William Daley, qui
entend poursuivre à la fois une stratégie de nivellement des
obstacles aux exportations américaines et une prise en compte
systématique des enjeux politiques nationaux : << We cannot step
back in a world in which our global competitors are aggressively pursuing
market opportunities for their companies(...) But we can ensure that all of the
department's programs meet the standards of excellence and integrity that the
American people expect. >>[45] Des
propos du nouveau secrétaire d'État, Madeleine Albright,
confirment encore plus clairement cette nationalisation de la politique
commerciale américaine.[46]
En liant les préoccupations nationales, au sens strict, aux questions de
politique commerciale, la présidence peut certes en tirer des avantages
électoraux considérables mais elle se rend aussi plus
vulnérable aux différents blocages institutionnels et pressions
politiques. Ainsi, le Congrès continue de s'opposer fermement à
toute négociations commerciales qui chercheraient à lier les
questions des normes de travail ou de l'environnement à une
libéralisation commerciale. Or, ces questions sont autant de
moto de factions importantes du parti démocrate. Ayant à
choisir entre une collision avec le Congrès et les tensions que de
nouvelles négociations commerciales pourraient induire au sein du parti
démocrate, on comprendra le peu d'empressement de la Maison-Blanche
à renouveler la procédure accélérée, qui
s'est terminée à la fin de 1994, afin d'entamer des
négociations avec le Chili.
En fait, loin de s'appliquer à étendre les cadres du
libre-échanges dans les Amériques, l'orientation de la politique
commerciale en est plutôt une de consolidation et d'évaluation.
Tout d'abord, la lettre des derniers accords du GATT rappelle également
à quel point les États-Unis ont cherché à
préserver jalousement leur propre souveraineté nationale et ce,
malgré la publicité entourant la création de la nouvelle
Organisation mondiale du commerce (OMC). Si on a largement souligné les
nouveaux pouvoirs de l'organisation, qui trancheraient avec la faiblesse tant
décriée des mécanismes de règlements des
différends du GATT, on a guère montré comment des pays,
comme les États-Unis, pourtant opposé à la Charte de La
Havane, composait avec l'invasion juridique que peut impliquer ces nouveaux
pouvoirs.[47]
La loi de mise en application des accords de la ronde de l'Uruguay, telle que
ratifiée par le Sénat le 1er décembre 1994, contient
différentes dispositions qui renvoie au Congrès toute conclusion
de l'OMC qui contredirait les lois américaines. Sans doute plus
important encore, le président Clinton s'est engagé à
mettre sur pied un panel de cinq juges fédéraux qui seront
appelés à évaluer les cas commerciaux impliquant les
États-Unis. Si les conclusions de ce panel montrent que les
États-Unis ont été traités inéquitablement
à plus de trois reprises au cours des cinq dernières
années, le Congrès sera autorisé à mettre un terme
à l'adhésion des États-Unis à l'OMC.[48]
Un pendant semblable pour l'ALÉNA est désormais envisagé.
En effet, le 7 janvier 1997, l'Orateur de la Chambre des Représentants,
Newt Gingrich, a plaidé en faveur d'une loi sur l'évaluation de
l'ALÉNA (NAFTA Accountability Act). Non seulement s'agit-il de
réévaluer l'entente mais également de voir à
renégocier, le cas échéant, les chapitres qui
s'avéreraient contraires aux intérêts américains.
Un autre projet de loi émanant de la Chambre des Représentants,
et également proposé par un républicain, vise à
suspendre les accords commerciaux, même s'ils sont déjà
ratifiés, en cas de fluctuations monétaires importantes, comme
lors de la crise du peso. Entre autres, ces différentes initiatives
législatives montrent bien le repli de la politique commerciale
américaine.
Il serait possible de ranger ces nouveaux mécanismes au rayon d'une
certaine stratégie, ou d'une rhétorique,
pro-libre-échangiste qui est, depuis longtemps, au coeur de la politique
commerciale des États-Unis. Pourtant, la fragilité des
équilibres politiques américains en faveur de cette option
politique, sans parler des nouvelles fragmentations partisanes, montrent bien
les risques de dérapage.[49] Pour les
partenaires immédiats, et éventuels, des États-Unis, un
tel repli sur soi souligne plus que jamais que le libre-échange n'est
pas une fatalité et qu'il reste matière à discussion.
Les fins de siècles sont souvent marquées par le doute et
la peur. Pour les états, elles ont souvent coïncidé avec
des replis sur leur territoire. Dans le cas des États-Unis, bien qu'il
soit difficile d'y discerner la peur, la politique commerciale y est maintenant
traversée par le doute. Comme nous l'avons dit, elle se conjugue
désormais selon des recettes éprouvées certes, mais
sont-elles toujours adéquates ? C'est de ce doute, et des
inquiétudes qu'il engendre, comme nous les montrent tous les Pat
Buchanan et autres Ross Perot, que nous avons voulu dire que la politique
commerciale sous l'administration Clinton en était une de <<
fin-de-siècle >>.
Nous avons voulu montrer comment, depuis 1992, la politique commerciale des
États-Unis s'établissait de plus en plus clairement en fonction
des paramètres et des déterminants nationaux. Dans ce contexte,
nous avons souligné la << nationalisation >> de la politique
commerciale des États-Unis.
Nous avons procédé en trois temps, c'est-à-dire que,
premièrement, nous avons montré comment certaines
préoccupations nationales, comme la compétitivité et la
contrainte budgétaire, se sont posés comme de véritables
paramètres de l'élaboration de la politique commerciale.
Deuxièmement, nous avons fait le point sur le cadre institutionnel
émergeant dans le sillage de ces nouveaux paramètres.
Troisièmement, tout en rappelant les équilibres traditionnels
guidant la politique commerciale américaine, nous avons esquissé
quelques unes des plus récentes orientations de cette politique
particulière et cherché à dégager certaines de ses
implications éventuelles.
Bien entendu, notre analyse demeure partielle sans le complément logique
que pourrait représenter une analyse plus détaillée des
stratégies des firmes et de leurs performances. Après tout, dans
un système politique où les pressions des groupes sont non
seulement légitimes mais encouragées, ce sont, ultimement, ces
performances qui risquent de dicter l'évolution de la politique
commerciale américaine. Néanmoins, nous croyons que l'analyse
présentée permet, entre autres, de mieux saisir comment un
administration peut, à la fois, forcer la ratification de
libéralisations aussi ambitieuses que les accords de Marrakech et avoir
recours à des mesures protectionnistes comme le Super 301.
La nationalisation de la politique commerciale américaine ne signifie
pas nécessairement un isolationnisme économique. En fait, en
ignorant la semonce d'organisations multilatérales comme l'OMC, ou en
prétendant ausculter les accords commerciaux déjà
existants à la lueur des intérêts américains, il
s'agit également d'une extra-territorialisation des normes et des
enjeux politiques américains. Dans ce contexte, c'est effectivement
à une véritable exportation de << façons de faire
>> économiques et commerciales, sans parler de questions comme la
drogue, l'environnement et les conditions de travail ; à laquelle on
assiste derrière la douce indifférence américaine. C'est
donc bel et bien un autre degré d'intégration qui se profile
derrière une communauté commerciale, l'ALÉNA, qui est de
plus en plus appelé à partager l'ordre du jour politique des
États-Unis. Dans quelle mesure les partenaires commerciaux du
géant américain consentiront-ils à cette
intégration nouveau genre ? Rien n'est moins incertain. Pourquoi des
pays devraient-ils renoncer à une partie de leur souveraineté
dès lors que l'accès commercial aux États-Unis
s'avèrent un privilège toujours remis en question ?
1979
6 juin
Un analyste mexicain, Redvers Opie, plaide, au Sénat, en faveur
d'un accord de libre-échange nord-américain devant le puissant
sous-comité des Finances sur le commerce international.
1988
2 janvier
Les États-Unis ratifient l'accord de libre-échange
canado-américain (ALÉ) le jour même que les
procédures accélérées (fast-track procedure)
viennent à échéance.
23 août
Le président Reagan entérine la Loi omnibus de 1988 sur
le commerce. Incarne l'idée du << free-and-fair-trade
>>.
1990
2 juillet
Le président Bush annonce l'Initiative pour les
Amériques.
1991
5 février
le Président des États-Unis, le Président du
Mexique et le Premier ministre du Canada annoncent leur intention d'en arriver
à un accord de libre-échange nord-américain.
1992
3 novembre
Élection de William Jefferson (Bill) Clinton à la
présidence des États-Unis. 42e président des
États-Unis. Premier président démocrate depuis James Earl
(Jimmy) Carter (1976-1980).
10 décembre
Création du Economic Security Council et nomination de
Robert E. Rubin comme président.
17 décembre
Signature de l'ALÉNA par les États-Unis, le Mexique et le
Canada.
1993
26 février
Discours de politique économique établissant en cinq
points les priorités de l'administration démocrate. Le
président Clinton annonce la nouvelle approche pragmatique et
nationaliste de la politique commerciale.
5 juillet
Les gouvernements américain et japonais lancent le <<
Nouveau partenariat économique >> comme nouveau cadre de
résolution des problèmes bilatéraux en matière de
commerce, d'investissement et de politiques macro-économiques.
20 novembre
Le Congrès ratifie l'ALÉNA créant une zone
commerciale de 360 millions d'habitants avec un PNB combiné de 6,5$
trillions.
22 novembre
Premier sommet informel du Forum de coopération économique
de l'Asie et du Pacifique (APEC) à Seattle.
15 décembre
117 pays en viennent à la conclusion des accords du GATT dans le
cadre de la ronde de négociations de l'Uruguay.
1994
1 janvier
Mise en vigueur de l'ALÉNA.
3 mars
Par décret, le président Clinton renouvelle les
dispositions de l'article Super 301 et désigne le Japon comme
cible prioritaire de l'article.
15 avril
Signature, à Marrakech, des accords de la ronde de
négociations de l'Uruguay devant mener à la création de
l'Organisation mondiale du commerce.
8 novembre
Pour la première fois depuis 1954, élection d'une
majorité républicaine à la Chambre des
Représentants. Newt Gingrich, Orateur de la Chambre.
30 novembre
Le Sénat ratifie, avec une très forte majorité, la
loi de mise en application des accords de Marrakech.
7 décembre
Sommet économique de Miami réunissant les chefs
d'État démocratiquement élus d'Amérique latine et
des Caraïbes afin de discuter de l'élargissement de l'ALÉNA
dans les Amériques.
1995
7 juin
Le représentant républicain, Dick Chrysler, dépose
un projet de loi visant l'abolition du Département du Commerce.
1996
24 février
Les avions de chasse cubains abattent deux avions civils d'une
organisation américaine anti-castriste.
12 mars
Ratification par la Congrès de la Loi sur la liberté
cubaine et la solidarité démocratique, mieux connue comme
étant la loi Helms-Burton, prévoyant des mesures de sanctions
économiques contre les partenaires commerciaux de Cuba.
3 avril
Le secrétaire au Commerce, Ron Brown, meurt dans
l'écrasement de son avion lors d'une mission commerciale en Bosnie. Le
vote et le projet de loi sur l'abolition du Département du Commerce
s'évanouissent au feuilleton.
4 novembre
Réélection de Bill Clinton. Premier président
démocrate à être réélu depuis Harry S. Truman
(1945-1953).
1997
7 janvier
Dépôt du projet de loi au Congrès sur
l'évaluation de l'ALÉNA (NAFTA Accountability Act).
20 février
Invoquant l'article XXI du GATT et les questions de <<
sécurité nationale >>, les États-Unis rejettent la
décision de l'arbitrage de l'OMC condamnant la loi Helms-Burton.
21 février
Un comité de l'OMC confirme la nature discriminatoire du
traitement réservé aux publications américaines vendues au
Canada. Les États-Unis contournent ainsi << l'exception
culturelle >> inscrite dans l'ALÉNA.
Références
[1]. Bruno Hamel(1991), Le nouvel ordre
international et la politique commerciale des États-Unis : quelques
développements récents, Montréal, Groupe de recherche
sur la continentalisation des économies canadienne et mexicaine, mars.
[2]. Département du Commerce(1996).
[3]. Le Devoir (1997), <<
L'économie américaine connaît-elle un âge d'or ?
>>, le 11 mars : B3 : << L'économie américaine,
timidement sortie de la récession en mars 1991, entame à
présent sa septième année de croissance dans des
conditions que beaucoup d'analystes décrivent comme les meilleures
depuis les années 60. >>
[4]. James McCormick et Eugene T.
Wittkopf(1990), << Bipartisanship, Partisanship, and Ideology in
Congressional-Executive Foreign Policy Relations, 1947-1988 >>,
Journal of Politics 52(4) : 1077-1100.
[5]. Suzanne Lohmann et Sharyn
O'Hallloran(1994), << Divided government and U.S. Trade policy: theory
and evidence >>, International Organization 48(4) : 595-632.
[6]. Jean-Jacques Subrenat et Nelly
Ponta(1994), << Les États-Unis, l'ALÉNA et l'APEC >>,
Politique étrangère 59(3) : 795-803 : (...)<< la
nouvelle équipe électorale accorde la priorité aux
problèmes internes et, en particulier, à la croissance
économique des États-Unis.(...) la politique extérieure
intéresse relativement peu l'actuelle Maison-Blanche, excepté
dans sa dimension commerciale. Les affaires étrangères sont donc
souvent gérées au regard de leur impact sur l'économie.
>>
[7]. Jack Citrin, Ernst B. Haas et Christopher
Muste(1994), << Is American Nationalism Changing? Implications for
Foreign Policy >>, International Studies Quarterly 38 : 1-31.
[8]. I.M. Destler(1989), American Trade
Politics, Washington, D.C., Institute for International Economics. Bruno
Hamel(1991), La politique commerciale des États-Unis : entre le
protectionnisme et le libre-échange, Montréal, Groupe de
recherche sur la continentalisation des économies canadienne et
mexicaine.
[9]. Pour la chronologie des faits ayant trait
à la politique commerciale des États-Unis, voir l'annexe I.
[10]. I.M. Destler(1995), American Trade
Politics, Washington, D.C., Institute for International Economics :
251-252.
[11]. Sur la question du lien entre
immigration mexicaine et la lutte à la drogue et ALÉNA on pourra
lire les propos du président Clinton dans Government of the U.S.(1993),
Presidential Documents, 29(44) : 2230 : (...) if NAFTA passes we will
get much more cooperation from the Mexican government in enforcing our
immigration laws and our drug laws. There's no question that we'll get a higher
level of cooperation on both those very important issues if this passes.
>> D'autre part, les groupes syndicaux et environnementalistes ont
vertement critiqué les accords de l'Uruguay à cause des lacunes
que ces accords présentaient aux chapitres des droits des travailleurs
et du respect de l'environnement. Lire Bob Benenson(1994), << With
Health Care Receding, GATT Pact Gains Urgency >>, Congressional
Quarterly Review, 24 septembre : 2661-2666.
[12]. GATT(1994), Examen des politiques
commerciales : États-Unis (vol. I), Genève, GATT : 29.
[13]. George Hager(1994), << Trade
Agreement's Financing Package Scours the Back Alleys of the Budget >>,
Congressional Quarterly Review, 24 septembre : 2662-2663.
[14]. Stephen Weatherford et Lorraine M.
McDonnell(1996), << Clinton and the Economy: The Paradox of Policy
Success and Political Mishap >>, Political Science Quarterly
111(3) : 403-436. << The federal deficit is clearly the primary material
constraint that the Reagan regime has bequeathed to its successors(...) The
impact of the deficit has been not only to force cutbacks(...) but also to
frame the economic policy program in such a way that any action that would
expand spending would require extraordinary justification. >> (413-414).
[15]. C. Randall Henning(1994-1995), <<
La politique économique extérieure de Clinton >>,
Politique étrangère 59(4) : 971-982. << Bien que
Clinton se soit présenté lui-même, pendant la campagne,
comme le candidat du changement, son Administration n'a pas renié les
politiques et les tendances de ses prédécesseurs. Les aspects
non multilatéraux des politiques de la nouvelle Administration
eux-mêmes sont des extrapolations des tendances constatées dans
les Administrations précédentes. >> (972).
[16]. McCormick et Wittkopf(1990) : 1097 :
<< The results also demonstrate that the comparative impact of ideology
is greater than partisanship. >> Voir aussi Government of the United
States(1996), << Impact of Congressional Power Shift on Foreign Policy
>>, U.S. Foreign Policy Agenda 1(9) : 13-16.
[17]. Analyses de la S.E.D.E.I.S.(1993),
<< Une nouvelle politique commerciale américaine ? >>,
Analyses de la S.E.D.E.I.S. (92) : 13-16. Lire Laurea d'Andrea
Tyson(1992), Who's Bashing Whom? Trade Conflict in High-Technology
Industries, Washington, D.C. Institute for International Economics.
[18]. Lire James Brander(1986), <<
Rationales for Strategic Trade and Industrial Policy >> in Paul
Krugman(ed.), Strategic Trade Policy and the New International
Economics, Cambridge, MA, MIT Press.
[19]. Mike Mills(1993), << Debate on
House Floor Dulls "Competitiveness" Luster >>, Congressional Quarterly
Weekly, 15 mai : 1219-1220 : << Last autumn [en 1992]
"competitiveness" emerged along with "family values" and "change" as a key
buzzword of the 1992 presidential campaign. >>
[20]. Jeffrey E. Garten(1993), <<
Clinton's Emerging Trade Policy >>, Foreign Affairs 72(3) :
182-189 : << Well before he was elected, Clinton was promising to recast
the entire intellectual basis of U.S. trade policy. Trade was to be an
integral part of creating competitive industries and high-wage jobs. It was to
be placed at the center of foreign policy, becoming at least as important as
political and security questions. >>(183).
[21]. Leo H. Kahane(1996), <<
Congressional Voting Patterns on NAFTA: An Empirical Analysis >>,
American Journal of Economics and Sociology 55(4) : 395-409.
[22]. Stanley D. Nollen et Dennis P.
Quinn(1994), << Free trade, fair trade, strategic trade, and
protectionism in the U.S. Congress, 1987-1988 >> International
Organization 48(3) : 491-525 : << The objective of strategic trade
policy is to promote the competitiveness of domestic firms in key industries at
the expense of foreign firms >> (497).
[23]. Holly Idelson(1996), << Advanced
Technology Program Caught in Tug of War >>, Congressional Quarterly
Weekly, 2 mars : 550-552.
[24]. David S. Cloud(1994), << The GATT
Battleground Shifts from Geneva to Capitol Hill >>, Congressional
Quarterly Weekly, 2 avril : 792-795.
[25]. Cloud(1994) : 794 : << All 44
Republicans in the Senate signed a letter to Kantor on Jan. 31 [1994] decrying
what was described as a "major shift in U.S. trade policy from one promoting
free-market competition to one promoting government subsidies and industrial
policy." >>
[26]. D'autres sources identifient ce conseil
à un << conseil nationale de l'économie >>. Lire
GATT(1994) (I) : 31.
[27]. Holly Idelson(1995), << Bill
Would Slash Commerce, International Programs >>, Congressional
Quarterly Review, 1er juillet : 1929-1932.
[28] Idem : 1929.
[29]. Jonathan Weisman(1996), << Senate
To Skip Kantor Hearings, Muffling Department's Foes >>, Congressional
Quarterly Weekly, 22 juin : 1758. Parmi les entreprises de la coalition on
retrouvait AT&T, Boeing, IBM et General Electric.
[30]. Cloud(1993) : 173 : (...)<<
Clinton considers trade policy an adjunct to his domestic agenda, not an end in
itself. >>
[31]. Destler(1995) : 221.
[32]. Weatherford et McDonnell(1996) : 419 :
<< The National Economic Council, as it soon came to be called, is the
centerpiece of the administration's economic policy network >>(...).
[33]. Destler(1995) : 221.
[34]. I.M. Destler(1980), Making Foreign
Economic Policy, Washington, D.C., Brookings Institution : 217-218. Roger
B. Porter(1983), << Economic Advice to the President: From Eisenhower to
Reagan >>, Political Science Quarterly 98 : 403-426. Alexander L.
George(1980), << The Case for Multiple Advocacy in Making Foreign Policy
>>, American Political Science Review 76 : 751-785.
[35]. Marc Levinson(1996), << Kantor's
Cant (The Hole in Our Trade Policy) >>, Foreign Affairs 75(2) :
2-8 : << By most mesures Kantor's tenure has been a resounding success.
The Clinton administration has not not produced a similar record of achievement
in any other field, foreign or domestic. >>
[36]. Bruno Hamel(1991), La politique
commerciale des États-Unis : entre le protectionnisme et le
libre-échange, Montréal, Groupe de recherche sur la
continentalisation des économies canadienne et mexicaine, août.
[37]. Soulignons que le premier
congrès de Clinton (1993-1994) fut le premier, depuis 1853, a ne faire
l'objet d'aucun veto de la part du président.
[38]. Alissa J. Rubin(1997), << "Fast
Track" and China Policy: Could This Be the Year >>, Congressional
Quarterly Weekly, 18 janvier : 162-166 : << "Trade is way down the
radar screen" said Sen. John H. Chafee, R-R.I. "I think people's minds are on
taxes, Medicare, Medicaid. There just hasn't been much attention paid to any
foreign issues. >> (163).
[39]. I.M. Destler(1986), American Trade
Politics, Washington, D.C., Institute for International Economics : 88, 105
et 166.
[40]. GATT(1994), Examen des politiques
commerciales : États-Unis (vol. II), Genève, GATT : 51. Les
proportions sont encore plus grandes en ce qui a trait aux droits
compensateurs.
[41]. Paul E. Peterson et Jay P.
Greene(1993), << Why Executive-Legislative Conflict in the United States
is Dwindling >>, British Journal of Political Science 24 : 33-55 :
<< Congress has showed a surprising resistance to demands for trade
protection from regional and locally based interests, despite a persistently
unfavourable balance of trade. >> (53).
[42]. Congressional Quarterly Weekly(1997),
<< Inside Congress: Special Report >>, Congressional Quarterly
Weekly, 25 janvier : << However, from the standpoints of the
administration and Congress it is unclear whether it is necessary to go forward
this year [avec la prcédure accélérée]. The two
largest trade deals on the horizon-- one with much of South America and another
with Pacific Rim countries -- are not scheduled for completion until after
2000. >> (212).
[43]. Jeffrey E. Garten(1995), << Is
America Abandoning Multilateral Trade? >>, Foreign Affairs 74(6) :
50-62 : << The administration is not hooked on theory, ideology, or
leftover Cold War sentiments. Quite simply, it is looking for workable
procedures and rules within a reasonable time frame. >> (53).
[44]. Maison-Blanche(1993), << Remarks
by the President at American University Centennial Celebration >>,
communiqué de presse, Washington, D.C., 26 février.
[45]. Juliana Gruenwald(1997), << Daley
Vows To Avoid Politics At Embattled Department >>, Congressional
Quarterly Weekly, 25 janvier : 238-239. Par ailleurs, la nouvelle
Représentante au commerce est Charlene Barshefsky. À ce titre,
elle aussi la nouvelle représentante des États-Unis à
l'OMC.
[46]. << L'un des objectifs majeurs de
notre gouvernement est de s'assurer que les intérêts
économiques des États-Unis pourront être étendus
à l'échelle planétaire. >> cité dans Le monde
diplomatique(1997), février :1.
[47]..En ce qui a trait à la <<
perte >> de souveraineté des États-Unis et la mise en place
du tribunal de réglement des différends de l'ALÉNA, et
comment celui compose avec le biais libre-échangiste du
président, lire Judith Goldstein(1996), << International law and
domestic institutions: reconciling North American "unfair" trade laws >>,
International Organization 50(4) : 541-564.
[48]. Bob Benenson(1994), << Free Trade
Carries the Day As GATT Easily Passes >>, Congressional Quarterly
Review, 3 décembre : 3446-3451.
[49]. Robert O. Keohane et Helen
V.Milner(1996), << The Impact of the International Economy on National
Policies: An Analytical Overview >> in Robert O. Keohane et Helen
V.Milner, Internationalization and Domestic Politics, Cambridge, Mass.,
Cambridge University Press : 25-47. << All else equal, the likelihood of
liberalization will decline with increasing partisan fragmentation
>>(...)(43). Lire aussi Douglas Rae(1967), The Political Consequences
of Electoral Laws, New Haven, Yale University Press.